Numéro 2 - Alice Zeniter
L'écrivain Alice Zeniter, invitée de MICHEL 2
Entretien réalisé par Marylène Carre, photos d'Emmanuel Blivet
Alice Zeniter a un accent normand, un nom algérien, les cheveux noirs et la peau brune. Elle a grandi en Normandie, vécu à Paris et s’est installée en Bretagne. Dans L’Art de perdre, son cinquième roman, l’écrivaine de 31 ans s’interroge sur le sens du mot « racines ». Que signifie « avoir des racines algériennes » quand on ignore tout du pays d’où l’on vient ? En a-t-on besoin pour exister ? Dans L’Art de perdre, Naïma, petite fille de harki, part en quête d’une histoire familiale qui ne lui a jamais été racontée. Comme elle, vous êtes petite-fille de harki née en Normandie. Pourquoi n’avoir pas écrit ce roman à la première personne ? Au départ, je ne savais pas si je voulais écrire à la première ou à la troisième personne. C’est en avançant dans l’écriture que j’ai eu envie que Naïma soit un personnage. Moi je suis l’écrivaine, le maître des marionnettes. Naïma est proche de moi ; le monde dans lequel elle a grandi est le mien. Mais je n’aime pas l’idée qu’elle soit mon double. Elle est plutôt mon cheval de Troie, qui me sert à traverser l’histoire, à faire passer dans les coulisses mon cheminement. Ma famille fait partie de la documentation, mais ce n’est pas une enquête sur elle. Le père et le grand-père, Hamid et Ali, sont des personnages fictifs nés d’histoires rencontrées et de bribes familiales. Je n’aurais pas voulu avoir à rendre des comptes à une version du récit familial, ou à des faits déterrés minutieusement par une enquête. J’ai besoin que l’écriture puisse m’emmener là où j’ai décidé. Cette liberté que laisse la fiction est très précieuse...
Pour lire la suite et voir toutes les photos, procurez vous MICHEL2